lundi 28 décembre 2015


Notice biographique (provisoire)



     Le billet du 2 août 2014 intitulé "Famille" esquissait la généalogie de Jean Routier et son milieu familial. La documentation réunie me permet de proposer une suite sous forme d'une notice biographique qui, comme l'indique le titre, doit être considéré comme provisoire.


Formation
        Après des études secondaires au lycée Janson de Sailly (1899-1902), Jean Routier entre à l’École des langues orientales, ce qui lui permet de bénéficier d'une disposition de la loi de 1889 réduisant, pour les jeunes gens issus des grandes écoles, le service militaire à un an (au lieu de trois) : il l'effectue de novembre 1904 à septembre 1905 et en sort Caporal. Il se prépare surtout au très sélectif « concours des places » de l’École Nationale et Spéciale des Beaux-Arts qu'il intègre en 1906 et qu'il semble fréquenter jusqu'en 1909. Les années d'avant-guerre sont peu documentées : quelques lettres à son frère laissent deviner une vie parisienne partagée entre exercices d'atelier et sorties dans le monde. Ses premiers dessins publiés repérés datent de 1910 et 1911, dans le journal Le Rire, ou encore pour le Bal de l'Internat. Il expose au Salon des Humoristes en 1911. Il se marie en février 1911 et devient père d'une petite fille, Alice, en août 1913.

 

L'Automobile aux Armées, 44, 15 mars 1919, p.20
gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France 

  La Guerre

        La période de la Grande Guerre est plus riche en documents : archives militaires et production dans la presse. Mobilisé en août 1914, il participe, en tant que sergent au 341e Régiment d'Infanterie, à la défense mobile de Verdun sur le front d’Argonne en août et septembre. A partir d’octobre 1915, il s'éloigne du front pour être affecté au Service Automobile du 13e Régiment d'Artillerie, échappant ainsi à Verdun. Il revient dans la zone des combats comme sous-lieutenant commandant une section sanitaire anglaise d'avril 1917 à août 1918. C'est dans le cadre d'une mission d'évacuation des blessés qu'il est intoxiqué par les gaz (21 avril 1918) mais qu'il refuse de se faire évacuer. Il est cité à l'ordre du régiment pour sa bravoure et son mépris du danger, et une seconde fois à l'ordre du service de santé pour son énergie, son calme et son initiative. Cette longue campagne contre l'Allemagne pendant quatre ans et demi lui vaut la Croix de guerre et la Légion d'Honneur (1931).

     


Cette guerre dont on ne mesure pas encore bien les conséquences sur sa personnalité lui permit aussi d'exercer son art. En effet, Jean Routier participe à la revue bimensuelle créée en février 1917 et rapidement animée par Gaston de Pawlowski, L'Automobile aux Armées, dont il devient le principal illustrateur. C'est sans doute à cette époque qu'il noue des relations avec des dessinateurs – par exemple le cartoonist anglais H. M. Bateman dont il s'inspira parfois – ou des journalistes comme Henri Decoin ou Robert Dieudonné dont il illustra plus tard les ouvrages. C'est dans cette revue qu'il commence aussi à dessiner pour la publicité. Il se forge une réputation de dessinateur d'automobiles.


L'Automobile aux Armées, 14, 30 septembre 1917, p. 47
gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France 

 

L'Automobile aux Armées, 39, 31 décembre 1918, p. 77
gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France 

L'entre deux-guerres

     D'artiste peintre, tel qu'il était qualifié dans les documents administratifs d'avant guerre, il passe insensiblement au statut de dessinateur de presse et d'illustrateur pour l'édition. Ses collaborations au Journal (1918-1927), aux Annales politiques et littéraires, à Je sais tout restent encore à réunir. Les illustrations pour des éditeurs (Ollendorff, Nelson, Plon, Gründ) donnent de très plaisantes jaquettes. Dans le domaine de la publicité, il marque une prédilection pour l’automobile (Voisin, De Dion Bouton, Hotchkiss) et ses accessoires (carburateur Solex, pneus Dunlop, huile Spidoléine), ou pour l’habillement (La Belle Jardinière, le Printemps).





Les années 30 voient une orientation de son activité vers l’actualité. La couverture hebdomadaire du Cri de Paris, journal satirique, fournit un panorama en images de la vie politique et diplomatique de 1931 à 1939 (plus de 350 couvertures !). Chaque semaine, il dessine aussi pour le cinéma, en fournissant à la société Éclair-Journal des dessins, sans doute plusieurs centaines, qui accompagnaient les titres des sujets traités par les Actualités cinématographiques et constituent aujourd’hui un reflet de la vie quotidienne.


Le Cri de Paris n° 1825 -  dimanche 20 mars1932, p.11
source : Bibliothèque historique de la ville de Paris (cl. de l'auteur) 



1939 marque une nouvelle rupture. A nouveau mobilisé, il est renvoyé dans ses foyers pour limite d’âge en décembre (il a 55 ans). On ne sait pas comment il traverse les années de l'Occupation. Les commandes semblent marquer le pas et ne reprennent guère après la Libération si l’on excepte quelques volumes de la collection verte chez Hachette, et la reprise des Actualités Éclair. Sa santé décline à partir de 1947 et quelques lettres le montrent parfois désabusé et las de la vie. Il meurt le 28 juin 1953 dans sa soixante dixième année et est inhumé au cimetière de Pantin.

 Jean Routier à sa table de dessin - c. 1930-1934
coll. SZR



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